Hausse des tarifs des péages autoroutiers
Racket des usagers au profit des concessionnaires d’autoroute, ça suffit !
L’année 2015 est l’année de la super cagnotte des sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA) qui ont emporté dans l’escarcelle de leurs profits sans limite, le plan de relance autoroutier du Gouvernement qui s’inscrit dans la poursuite des concessions actuelles des 6 sociétés historiques, privatisées en 2005-2006. Ces SCA bénéficient d’une situation de rente qui leur assure une rentabilité démesurée par rapport au risque supporté (endettement maîtrisé et risque trafic faible). Pour preuve, entre 2006 et 2014, la hausse du chiffre d’affaires des SCA a été de 26 %. Cette hausse s’explique majoritairement par l’augmentation continue des péages.
Dans le même temps afin d’accroitre la productivité des SCA, près de 3000 emplois ont été supprimés dans les SCA, majoritairement grâce à l’automatisation des péages, ce qui n’empêche pas les SCA de bénéficier du CICE. Avec l’augmentation du chiffre d’affaire et la diminution des charges de personnel ces SCA génèrent une forte augmentation du résultat net avec un taux de rentabilité des capitaux propres de 15 à 20%, bien supérieur et en total décalage avec les primes de risque exigées par le marché (7 à 8 %). La Cour des comptes estime que la privatisation et les contrats de plan successifs auraient dû se faire sur la base d’un taux de rentabilité interne de 6 à 7 % au lieu des 8 à 10% actuels (soit un écart de 20 à 30 Mrds € avec la situation actuelle sur la durée de la concession).
Alors l’Etat serait-il piégé aux péages suite au protocole d’accord du 9 avril 2015 entre les SCA et le Gouvernement qui lui a permis de passer en force le plan de relance autoroutier d’investissement de 3,2 Mrds€, consistant à échanger des travaux immédiatement réalisables contre des prolongations des concessions de plus de 2 ans?
Certes, ce plan de relance autoroutier a été balisé de mesures dites de compensation de la part des SCA de verser 1 Mrd € à l’Etat sur la durée des concessions pour alimenter un fonds d’investissement et du gel des tarifs de péages depuis février 2015 que les SCA pourraient récupérer sur la période 2016-2017.
La CGT a dénoncé et combattu le choix du Gouvernement de mettre en place son plan de relance autoroutier, piloté par E.MACRON, qui va amplifier les profits faramineux des sociétés. Car en échange de 3,2 Mrds€ de travaux, les sociétés concessionnaires percevront une douzaine de milliards d’euros de péages entre 2028 et 2035 par la prolongation de leurs concessions. Selon nos analyses, pour une compensation similaire, l’Etat aurait pu engager 8,6 milliards d’euros s’il avait réalisé lui-même les investissements en empruntant au taux de 1,5% sur 15 ans. Qui plus est, selon la Cour des comptes les hypothèses retenues dans les négociations avec l’Etat sont largement avantageuses pour les SCA et pourraient aboutir à une surcompensation de plus de 2 milliards d’euros !
Les contrats de plan négociés avec les SCA précisent les hausses de péages applicables, généralement 80 à 85 % de l’inflation, plus un pourcentage fixe qui correspond à la compensation d’investissements supplémentaires. Les investissements à compenser ces dernières années ont été jugés contestables (par exemple la compensation du télépéage sans arrêt) par la Cour des comptes. De même, les hypothèses économiques sont « souvent à l’avantage des sociétés concessionnaires » (taux d‘actualisation, prévisions de trafic, évolution des charges…), ce qui, en tout état de cause, ne devait être qu’une simple compensation d’investissements supplémentaires devient pour les SCA le moyen de réaliser un profit.
C’est bien le modèle économique des concessions actuelles qui ne peut qu’aboutir à une hausse continue des tarifs.
Pour la CGT, la seule solution est dans la maîtrise publique du réseau d’autoroute qui passe par la renationalisation des SCA. C’est, une évidence économique partagée par de nombreux acteurs et Parlementaires, mais qui est balayée par le Gouvernement au prétexte de la dette. C’est pourtant une exigence sociétale, pour assurer une gestion publique de l’entretien et de l’exploitation des routes et nécessaire pour la baisse des péages !
Le problème des tarifs des péages, de leur niveau et des augmentations envisagées de 0,9 à 1,6 % selon les SCA, renvoie aux responsabilités de l’Etat qui, de fait, impose à travers les concessions perpétuelles, le système coûteux des péages pour les usagers alors que celui-ci est de plus en déconnecté des réalités économiques de l’exploitation des autoroutes et fait perdurer la captation de la rente par les grands groupes concessionnaires et leurs filiales adossées au major du BTP.
Il est bon aussi de rappelé que les renoncements du gouvernement sur l’écotaxe poids lourds et le démantèlement des portiques sont supportés par le citoyen contribuable qui va payer deux fois : en tant que contribuable et en tant qu’usager des autoroutes !
La réponse de la ministre de l’Ecologie, en cette période de COP 21, qui fait valoir son étonnement sur la demande d’augmentation des tarifs de péages des SCA qu’elle a tout de même signée avec parution au « Journal officiel » du 23 aout 2015 pour rattraper le gel depuis février 2015, ne peut se réduire à mesurer le calage des tarifs par rapport à l’inflation, mais bien de remettre en cause les distorsions avérées entre péages et coûts qui pour la CGT apportent les justifications économiques, sociales et environnementales pour geler les péages pour la période à venir dans la logique de retour des autoroutes concédées dans le giron public.
Montreuil, le 4 décembre 2015