Des semaines après le déconfinement, nous devons apprendre à vivre et à travailler avec ce virus. Il est indispensable de repenser nos processus de production et redonner du sens au travail. Les objectifs d’hier ne pourront pas être ceux de demain.
Refusons les cures d’austérité
Aujourd’hui, le monde de la finance prône l’austérité et demande aux salariés de payer les efforts de reconstruction. Ils veulent retrouver au plus vite leurs taux de profit !
Les mêmes logiques qui ont fermé tant de lits d’hôpitaux, imposent encore moins de services publics au nom de la situation économique. La SNCF en a déjà pâti et les dernières annonces sont lourdes de conséquences.
La réduction des effectifs dans les sièges, garantira-t-elle des moyens supplémentaires en établissement ou au contraire, moins d’appui, moins de transversalité et d’unité pour le groupe SNCF ?
Le travail, pourquoi et comment ?
Pour la CGT, nous devons repartir de la réponse aux besoins : ceux du transport ferroviaire pour les usagers et la population.
L’UFCM-CGT sollicite la participation effective des Maîtrises et Cadres à la définition de leur travail et l’évaluation des moyens requis pour construire, ensemble, les revendications.
Le travail doit prendre un sens, avoir une utilité, une finalité pour l’intérêt général, cela ne peut pas être le business.
Il doit aussi se réaliser en améliorant nos conditions de vie, en aménageant du temps pour la famille, la culture, le sport…
Le monde de demain, quels enseignements ?
Au plein cœur de la crise, nous avons su mener une production ferroviaire qui répond aux enjeux stratégiques de la Nation pour les personnels indispensables, les malades ou les marchandises.
Il faut maintenant, non seulement, répondre aux be-soins actuels : déplacements domicile/travail, de loi-sirs et économiques, mais aussi contribuer à la réindustrialisation, respectueuse de l’environnement, du pays.
La structuration actuelle qui met en concurrence les cheminots entre eux a montré, bien au-delà de ses limites, sa nocivité. Faut-il continuer dans l’éclatement total ou bien plutôt réunifier, mutualiser les savoirs en proximité appuyés sur des lignes métiers ?
Le temps de travail
Nous sommes rémunérés pour 1589 heures réparties sur un nombre de journées déterminées (205 ou 214 en général à la SNCF) pour une année. Au-delà, les heures supplémentaires doivent être comptabilisées, récupérées ou indemnisées, que l’on ait un tableau de service ou un forfait en jours.
La réduction du temps travail, le progrès pour tous
L’évolution de nos compétences et les progrès technologiques nous permettent de produire plus en moins de temps. Cette productivité ne doit-elle pas bénéficier aux salariés sous forme de réduction du temps de travail ?
Adéquation charges/ ressources : clé de l’équilibre
Si la charge de travail n’est pas accomplie en 1589 h, alors elle doit être revue et partagée.
Parce que le monde du travail est rempli d’imprévus, dont la plupart dépendent de l’organisation de l’entre-prise et de son environnement, nous ne sommes pas rémunérés à la tâche, mais pour un temps de travail. Ceci est un acquis des premières luttes du XIXe siècle. Le forfait jour en est une remise en cause.
L’enjeu est le décompte de tous les temps de travail avec des règles pour garantir les temps de repos.
Confinement et conséquences
Pendant le confinement, nous avons certainement tous pris du retard dans notre travail, Or :
- le télétravail, plus ou moins efficace, est du temps de travail ;
- les journées de chômage partiel sont à déduire du temps annuel. Vouloir les travailler serait du travail gratuit et un abus de l’employeur qui a bénéficié des indemnités légales ;
- Les jours de repos imposés pendant le confinement ont dû être réellement pris. Dans le cas contraire, ce serait du vol et du travail gratuit pendant un repos.
Télétravail, oui, mais sous certaines conditions
Pour garantir le temps passé avec sa famille, le partage des tâches domestiques et des loisirs… pour prendre soins des autres et de soi, il faut des frontières franches entre le travail et la vie personnelle.
Les études démontrent que les femmes en majorité cumulent le travail et gestion des enfants. En 2020, cela n’est plus admissible.
La Fédération CGT des cheminots fait des propositions pour que le télétravail ne rompe pas les liens sociaux et ne colonise pas nos vies. : Fournitures de bureau dans la gare la plus proche du domicile (sans porter de gilet rouge), limitation à 2 jours par semaine sauf justification médicale, horaires fixes. Pour les jours travaillés sur le lieu de service, un bureau personnel doit être garanti (pas de bureau flexible déshumanisé).
Le volontariat doit être la règle. Le dirigeant N+1 ne peut pas le supprimer unilatéralement, les refus doivent être argumentés pour des raisons de bonne marche du service.
À situation particulière, réponse particulière !
La crise sanitaire bouscule les façons de produire, l’économie, les attentes de la Nation vis-à-vis du transport ferroviaire. Ceci a des conséquences sur les chiffres d’affaires, mais aussi sur la production à venir, qui doit être repensée.
Les anciens plans n’ont plus aucune valeur ! Continuer à évaluer les cadres et maîtrises sur les anciennes bases est donc complètement illogique.
C’est en fonction de ce qui va devoir être fait, de priorités clairement affichées et énoncées, de définition des moyens liés, que la charge de travail et les « objectifs » de chacun doivent être rediscutés et redéfinis.
L’emploi, c’est l’avenir
Le président de la SNCF a annoncé que les suppressions d’emplois ne devaient plus être un tabou. Ce tabou est largement dépassé avec environ 2 000 emplois supprimés par an depuis 2017. Les annonces ciblent plutôt les sièges, pour concentrer les efforts sur la production en établissements.
Alors, plusieurs questions se posent :
- Peut-on contraindre sans fin les effectifs et continuer à assurer partout une production et un service satisfaisants ?
- De quelle production ou service peut se passer le système ferroviaire ?
- N’y a-t-il pas un risque de sortir de l’entreprise publique/historique une partie de ses métiers ?
- Si on vide les sièges, où sera la nécessaire transversalité entre chaque entité ?
- Qui assurera et assumera le pilotage des lignes métiers ? Des fonctions RH ?
- Les établissements seront-ils de plus en plus autonomes ? Avec quels risques pour les cursus professionnels et les passerelles (inter-établissements, inter-métiers, inter-activités) ?
La SNCF, un groupe public… unifié ?
La réforme de 2020 s’applique et déjà, la SNCF marque le pas. Ce modèle, pensé pour une ouverture à la concurrence contre vents et marées, n’a jamais autant fragilisé l’avenir de l’entreprise.
- Peut-on se contenter de vider les sièges sans revoir en profondeur la structuration même du GPU ?
- Cette structuration ne doit-elle pas reposer plus sur les finalités du transport public ferroviaire et des besoins des populations que sur des objectifs financiers et comptables par activités ?
- L’heure de l’unification n’a-t-elle pas sonné ?
Dans mon service, quels sont nos besoins ?
Une entreprise de service public, nécessitant une technologie précise avec un devoir intransigeant de sécurité, a besoin de quels savoirs et compétences et avec quels salariés ?
La situation a démontré, une fois de plus, qu’en cas de crise, la capacité à maîtriser tous les aspects de la production pour pouvoir les adapter est indispensable.
Nous devons, service par service, et collectivement identifier ce qui a fonctionné et ce qui a été un frein, pour déterminer quels savoirs, quelles compétences avec quels salariés et avec quels moyens nous pouvons être efficaces et réactifs.
Travailler ensemble : des établissements multi-activités par bassins d’emplois
Certains services comme l’Équipement ou la SUGE, ont une organisation avec des établissements très vastes, parfois nationaux, les structures hiérarchiques intermédiaires sont donc plus grandes. Les activités prennent des décisions indépendamment, comme si les autres n’existaient pas. Cela nuit à l’efficacité et la coordination de la production ferroviaire et de la réglementation RH.
Dans l’immédiat, la CGT a demandé la désignation d’un coordinateur unique, proche du terrain, compétent pour prendre les décisions s’appliquant à toutes les SA et activités. À terme, ne devrions-nous pas repenser une entreprise ferroviaire unique et intégrée ?
Internaliser pour maîtriser sa production et affronter les aléas
Nous sommes les experts du ferroviaire, car nous savons faire ! Le rôle des maîtrises et des cadres est d’organiser, de gérer les compétences, d’appréhender le patrimoine, l’environnement et préparer l’avenir.
Au quotidien, nous dépassons les aléas afin d’assurer un service public tourné vers l’intérêt général. Nous devons être entendus. Les moyens et les compétences nécessaires à la réalisation de chantiers permettent de respecter toutes les exigences de qualité, sécurité, de respect des normes qui sont de notre responsabilité.
Avoir une véritable maîtrise de la production
Si la sous-traitance en cascade ne permet pas de disponibiliser des moyens humains face aux situations exceptionnelles, elle génère des surcoûts de production.
Externaliser son activité peut créer l’arrêt ou le ralentissement de la production, des difficultés dans le travail d’encadrant opérationnel, au risque d’un sur-engagement avec des conséquences personnelles et pour la sécurité des circulations.
Un système de production intégré ne place pas les salariés en concurrence, mais en coopération.