Courrier au ministre délégué chargé des Transports, Clément Beaune
Monsieur Clément BEAUNE
Ministre délégué chargé des Transports
Hôtel Le Play
40 rue du Bac
75700 PARIS
Monsieur le Ministre,
Depuis plusieurs mois, notre pays traverse une profonde crise sociale et démocratique. Les décisions brutales et régressives du Gouvernement, en matière socio-économique notamment, entraînent colère, interrogations et pertes de repères chez les salariés.
Le conflit social contre la réforme des retraites est éloquent du niveau de fracture largement entamé entre la population, les salariés et les dirigeants politiques actuels. Le Gouvernement auquel vous appartenez installe l’austérité en France pour répondre aux injonctions budgétaires de la Commission européenne, se matérialisant par une forte dégradation des conditions sociales, de vie et de travail pour les salariés.
La politique gouvernementale, particulièrement obnubilée par le dogme libéral, accélère la casse continue des services publics dans notre pays, notamment dans le ferroviaire. Deux réformes du système ferroviaire (2014 et 2018) ont particulièrement affaibli l’outil public SNCF.
Le manque de moyens investis dans le secteur ne permet pas son développement et ne permet donc pas de pouvoir répondre aux besoins de la nation.
Une intervention forte de l’État, particulièrement par des financements publics pérennes et correctement fléchés, est nécessaire, notamment en ce qui concerne l’infrastructure, le matériel roulant, les moyens humains dans les gares, dans les trains, sur les chantiers de fret ou autres métiers administratifs. Les moyens doivent être mis pour améliorer sensiblement les conditions sociales et de travail des cheminots et le niveau d’emploi afin de travailler correctement.
À la situation de désengagement de l’État dans son outil public, la SNCF, s’ajoute une accumulation d’annonces brutales qui fragilisent l’avenir du service public et la santé de nos collègues.
En effet, liquidation de la SAS Fret, création d’un GIE « Optim’Services » au niveau de la SA de tête, processus d’ouverture à la concurrence sur plusieurs lignes TER, Transilien et TET, entraînent incertitudes et inquiétudes, notamment sur les conditions d’emploi et les droits des cheminots.
Les profondes transformations que vous opérez, de concert avec la direction de la SNCF, trouvent des traductions à tous les niveaux de l’entreprise : modifications de périmètres d’établissements, délocalisations forcées de centaines de collègues, modifications des contours métiers, désorganisations de la production, multiplications des réorganisations.
La situation est grave. L’unité sociale vantée par la direction de l’entreprise vole en éclat. Les retours qui nous remontent en masse des lieux de travail témoignent d’un désarroi inquiétant de la part de nos collègues.
Malgré nos alertes régulières auprès de la direction de l’entreprise, nous constatons que l’ensemble des enquêtes sur les risques psycho-sociaux (RPS) déclenchées par les directions lors des projets de réorganisation et présentées dans les instances représentatives du personnel (IRP) s’assurent tout juste du minimum légal.
Elles ne sont pas suivies d’actions concrètes modifiant ou remettant en cause les nouvelles organisations du travail. Ces manquements importants sont relevés dans toutes les expertises déclenchées par les représentants du personnel.
S’il survenait un accident ou un incident lié aux sujets décrits, la faute inexcusable de l’employeur, donc de la direction du GPU, serait démontrable parce qu’elle a connaissance des situations et n’a pas pris toutes les mesures pour que ces accidents ou incidents ne surviennent pas.
Parallèlement, nous vous alertons sur l’intensification des dossiers disciplinaires envers les cheminots et leurs représentants.
C’est avec gravité que nous vous adressons ce courrier concernant la situation alarmante que vit l’ensemble du corps social de la SNCF depuis plusieurs mois.
Le Gouvernement, par le ministère de tutelle, porte une responsabilité sur cette situation de danger à laquelle ses décisions exposent l’ensemble des cheminots.
Dans l’attente de vous lire, recevez Monsieur le ministre, l’expression de mes respectueuses salutations.
Thierry NIER
Secrétaire Général adjoint
Fédération CGT des cheminots