RETRAITE : DÉCRÉTONS LA SUITE !
Protection sociale
Après la promulgation d’une loi non votée, remettant en cause le droit à retraite de l’ensemble des salariés de tous régimes, le gouvernement a édité des décrets d’application empreints de la même régression sociale.
Le conseil d’administration de la CPR SNCF était consulté le 21 septembre dernier sur le projet de modification du décret retraite du régime spécial des cheminots.
Après des mois de piétinement démocratique, le refus massif des salariés d’être victimes d’une énième réforme des retraites à rebours des enjeux de protection sociale de notre époque est toujours intact. La contre-réforme des retraites de l’année 2023 se fracasse sur la nécessité de travailler moins et de travailler mieux et sur l’absolue nécessité de reprendre la main sur la répartition des richesses produites au profit des droits des travailleurs.
L’évolution de l’espérance de vie n’a pas compensé les effets des dernières réformes sur nos droits à la retraite, provoquant ainsi une diminution de la durée passée en retraite. Le progrès social consisterait par ailleurs à réduire le temps passé au travail, quand bien même l’espérance de vie augmenterait.
Le projet de décret transposant la loi de financement rectificative de la Sécurité sociale (entérinant la contre-réforme des retraites du gouvernement Borne) à notre régime spécial de retraite porte les effets nocifs et dangereux de cette contre-réforme :
- report progressif de 2 années de l’âge d’ouverture des droits, dès la génération 1973 pour les agents de conduite et dès la génération 1968 pour les autres agents. Cette augmentation de l’âge d’ouverture des droits se fait de façon progressive, à compter du 1er janvier 2025 et est étalée sur 7 ans (2025-2031). Les agents ouvrant leurs droits avant le 1er janvier 2025 ne sont pas impactés par ce relèvement de l’âge de départ en retraite. C’est la lutte des cheminotes et des cheminots qui a permis cet étalement des effets de la réforme au-delà de 2025 au lieu de septembre 2023 pour le régime général ;
- augmentation de la durée d’assurance requise ;
- accélération de la mise en oeuvre de la réforme Touraine de 2014, avec un passage à 172 trimestres avancé de quatre générations dès 2031. Cette accélération des effets négatifs entraîne :
- soit un report du départ de l’agent et donc du temps passé en retraite,
- soit une baisse du montant de la pension pour un départ au même âge ;
- refus du gouvernement d’ajuster le mécanisme de préretraite existant pour les agents ayant été victimes d’un empoisonnement à l’amiante puisque la période de reconstitution de leur carrière pour le calcul du montant de leur pension – comme si elle n’avait pas été impactée par les maladies professionnelles en découlant – s’arrête à l’âge de 55 ans malgré l’évolution de l’âge d’ouverture des droits à 59 ans.
La mobilisation des cheminots dans le conflit des retraites, impulsée par la CGT, aura néanmoins permis que le gouvernement acte le figeage de l’âge d’annulation de la décote (âge pivot) à 57 ans pour les agents de conduite et à 62 ans pour les autres cheminots.
D’autres dispositifs non spécifiques à notre régime spécial et existant par ailleurs sont transposés tels quels, sans aucune lisibilité sur les droits associés et sous couvert d’hypothétiques instructions ministérielles à venir… Il s’agit de la possibilité de rachat de trimestres d’études ainsi que de la retraite progressive, qui consiste à liquider une partie de la pension concomitamment à la poursuite de l’activité professionnelle en raison de l’insuffisance de la pension à répondre aux besoins des cheminots au moment de la liquidation des droits !
C’est bien le recul régulier de la protection sociale des cheminotes et des cheminots qui conduit à de tels contre-progrès sociaux. Rappelons que la part des salaires (donc du financement de notre protection sociale) dans la valeur ajoutée, en France, est passée de 75 % en 1982 à 58,2 % en 2020. Face à ce recul majeur des droits à la retraite des cheminots, issus de notre force de travail, les administrateurs CGT ont voté CONTRE ce projet, suivis par l’ensemble des autres fédérations de cheminots.
Le président du conseil d’administration (nommé par le gouvernement) ainsi que la direction de la SNCF, main dans la main, ont voté POUR. Le projet de décret est désormais transmis au gouvernement pour publication au Journal officiel.
La CGT va rapidement impulser une démarche revendicative autour d’une amélioration de la CPA pour l’ensemble des cheminots statutaires et contractuels afin d’annuler les effets délétères de cette contre-réforme sur le droit à profiter de la vie après le travail.